Profondeur abyssale du ventre de la terre. Vegas a l'impression d'être entrée dans l'antre d'une bête sanguinaire. Elle n'est pas si loin de la vérité. La belle s'enfonce dans les ténèbres du bunker sanglant, un frisson lui parcourant l'échine. Labyrinthe tentaculaire, relent de rage et d'hémoglobine elle n'est qu'un papillon de nuit pris dans la toile des Robustes. Elle n'est pas le bienvenue en ici, tout en ces murs le lui crache en pleine figure. Suivant de près le seul Rouge qui a consenti à lui servir de guide, elle sent les regards plein de dédain de ceux qu'ils croisent lui brûler la peau. Remarques outrageantes, bruits et gestes obscènes ils la provoquent, la traquent. Meute de loups voraces, leurs dents claquent contre ses chevilles. Tête haute et mine fière, elle se pare d'un masque glaciale pour les ignorer. Ne jamais montrer sa peur aux prédateurs, jamais. Une leçon depuis bien longtemps acquise, bien avant la Pangée, dans le froid mordant de sa Russie natale.

Après un temps qui lui semble une éternité Vegas se retrouve seule avec son guide. Dédale de couloirs interminables, un tournant, une impasse. Le robuste s'arrête, elle l'imite. "Je te remercie pou cette visite des plus... plaisantes. J'aimerai voir Jakarta maintenant..." Méfiance dans la voix de la demoiselle, ça sent le coup fourré à plein nez. Il se retourne, un sourire carnassier étirant ses lèvres et hausse les épaules. "Il est absent. Mais je suis sûr que je peux t'aider ma belle." Vegas hausse un sourcil avant de les froncer. Le visage dur et la voix ferme elle le contredit. "L'affaire qui m’amène ici ne concerne que ton Roi." Un rire infâme s'échappe de la gorge de l'homme, son écho résonne dans les couloirs déserts. Il s'approche, elle recule. Son dos heurte un mur froid et il se colle à elle, la prive de toute fuite.  "Tu m'en dira tant. Je sais bien pourquoi une élégante vient voir le boss, me prend pas pour un con. Une queue est une queue et en bonne traînée des Terres Noires tu ne verra pas la différence." Sa main rugueuse remonte le long de son bras, fait glisser la bretelle de sa robe ébène avant de parcourir la peau dénudée de sa poitrine. Vegas se fige et il enserre son cou de sa main. "Sois gentille et ne m'oblige pas à m'énerver." Il la tient, elle est piégée, personne ne l'entendra crier. Du moins c'est ce qu'il pense. Crier? Elle n'en aura pas besoin. Cette fois c'est au tour de la princesse de sourire, de se rapprocher. "Comment dire non à un homme tel que toi?" Le sourire béat que cet idiot lui adresse montre à quel point il ne sait pas dans quel pétrin il s'est fourré. Quand ses doigts immondes ont effleuré sa peau, son destin s'est scellé donnant l'occasion à Lady Luck d'utiliser son don et de lui faire payer son affront. Les mains de la belle se pose sur ses hanches et elle le fait doucement reculer de quelques pas sans qu'il ne se doute de rien. L'air aguicheur Vegas fait mine de commencer à se déshabiller alors que le lourd lampadaire en métal juste au dessus de sa tête se met à bouger dangereusement. "C'est vraiment mon jour de chance. Soudain la luminaire se détache et heurte la tête du robuste dans un craquement sinistre. Tel une marionnette dont on a coupé les fils il tombe lourdement au sol. Vegas soupire agacée en remettant sa bretelle et enjambe cette raclure inconscient. Elle se trouvera seule le bureau de @Jakarta.

Grâce à la chance qu'elle a subtilisé à cette brute sans cervelle, cela ne prend que quelques minutes. Elle n'a qu'à se laisser guider par la petite voix que la bonne fortune lui chuchote à l'oreille. Bientôt elle se retrouve devant une épaisse porte et elle sait d'instinct qu'elle a trouvé ce qu'elle cherchait. Elle n'est pas verrouillée et l'élégante n'a qu'à pousser le battant pour entrer avant de refermer derrière elle, autre cadeau de son don au combien pratique. Finalement cette ordure disait vrai. @Jakarta ne s'y trouve pas. Tant pis, elle l'attendra ici. La pièce est plongée dans la pénombre, seule une bougie en grande partie consumée apporte un peu de lumière. L'air est empli d’effluves d'alcool et cette odeur si particulière qui est la sienne. Ce parfum qu'elle connait si bien et qui la ramène bien des années en arrière. Quand ils s'étaient encore si proche, avant qu'elle ne faute, qu'ils se déchirent, qu'ils se blessent, qu'elle ne le perde. Elle a tout gâché. Ce souvenir douloureux lui serre le cœur alors qu'elle s'approche du bureau où la bougie brûle encore. Perdue dans ses pensées, Vegas se retrouve hypnotisée par la flamme dansante dans ses yeux. Elle lève la main et laisse sa chaleur lui lécher les doigts. Sa morsure devient presque douloureuse alors qu'elle se retrouve aspirée dans le souvenir d'un autre brasier. Celui qu'elle avait elle-même allumée pour faire partir son passé et ce monstre en fumée sans savoir qu'il continuerai à la hanter.  A jamais.
    

( Pando )